Recherche médecins désespérément...

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BRIAND
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Recherche médecins désespérément...

Message par BRIAND »


Recherche médecins désespérément...
Mise en ligne : 6 juin 2011


Trouver un médecin pendant l’été semble parfois relever du parcours du combattant. À période exceptionnelle, situation exceptionnelle. Mais cette «  pénurie estivale  » ne fait que révéler de manière exacerbée le problème plus que préoccupant de «  démographie médicale  » qui sévit toute l’année.

Avec terreur, Isabelle se souvient d’un ­week-end de pont à Marseille. Souffrant d’une douleur très forte dans le ventre, elle consulte le journal pour trouver un généraliste… Ce week-end d’été-là, dans la ­deuxième plus grande ville de France, quatre médecins seulement sont de garde. «  Aucun dans mon arrondissement, le VIIe. Après de multiples tentatives, j’ai réussi à parler à l’un d’entre eux, une femme totalement débordée. Je ne dépendais pas de son secteur. Elle m’a renvoyée vers les urgences.  » Aux urgences de l’hôpital de la Timone, il ­y a foule. Vraies urgences ­côtoient petits bobos… La panique est indescriptible. «  Deux pauvres internes tentent vaille que vaille de gérer la pénurie… Ma douleur ne cesse d’augmenter.  » Plusieurs heures d’attente et une échographie plus tard, le diagnostic tombe  : colique néphrétique. «  Depuis cette histoire, je suis en panique à l’approche des vacances, et plus encore quand je vais dans un coin sans hôpital… En cas de crise, où trouver un médecin  ?  »

«  Moi aussi j’aimerais bien le savoir, s’interroge ­Gérard Aoustin, vice-président du conseil de l’ordre de Seine-Saint-Denis, en région parisienne. En trente ans, le nombre de médecins a augmenté de 90 %, mais sur le terrain, auprès des populations, dans la permanence des soins, ils se font de plus en plus rares.  » En Seine-Saint-Denis, le fait est établi. Il est presque impossible pour un généraliste d’espérer trouver un remplaçant pendant ses congés  : Khalid Iboussissen, médecin à La Courneuve, en témoigne  : «  Quand j’ai un candidat potentiel au bout du fil et que je prononce 9-3, c’est tout juste s’il ne me raccroche pas au nez.  »

Loin des banlieues difficiles, l’air de la campagne n’attire pas plus  : le Dr Pierre ­Jeannin, médecin généraliste à Mailly-le-Château, dans l’Yonne – le premier confrère est à 15 kilomètres –, le sait bien. «  Mes congés  ? Ce n’est pas moi qui décide des dates. C’est mon remplaçant, un médecin retraité qui habite Reims. J’ai la chance qu’il ait d’excellents amis dans la région. Il aime bien venir de temps en temps passer une quinzaine de jours dans le coin.  » Pourtant, les médecins remplaçants n’ont jamais été aussi nombreux. Leur nombre s’est accru de 9,1 % entre 2007 et 2010. Mais les chiffres sont trompeurs… Si, pendant des décennies, être remplaçant voulait dire prendre la relève d’un confrère pendant les vacances, aujourd’hui il s’agit plutôt d’un statut pérenne qui correspond à un nouveau mode d’exercice de la médecine. Il séduit une nouvelle génération de médecins dont un grand nombre de femmes, qui choisissent ainsi de «  travailler à la carte  ». Si on est remplaçant, on l’est dans son quartier, à mi-temps, deux jours par semaine, sur une longue durée. Avant 2003, le Code de déontologie médicale établissait le devoir pour chaque médecin généraliste de rester toujours accessible pour sa patientèle. Ce n’est plus le cas. Contrairement à ses confrères allemands, pour lesquels la permanence des soins [1] est une obligation, le médecin français n’est de garde que s’il est volontaire.

La chasse au remplaçant

«  Les jeunes médecins ne souhaitent plus travailler comme on l’a fait, témoigne Marc Dupont, ancien chef du service ­d’anesthésie de l’hôpital Saint-Joseph à Marseille et aujourd’hui à la retraite. Ma ­génération a consacré sa vie à son boulot… Peu de week-ends, peu de vacances. C’était comme ça. On ne se plaignait pas…  » Ponctuellement, il reprend du service dans des hôpitaux en mal, eux aussi, de remplaçants. «  De plus en plus de retraités font comme moi quelques semaines par an. La demande est si forte… Mais, bien sûr, ils préfèrent Bastia en été à Lunéville en janvier. A Arcachon, l’hôpital a mis une clause dans son contrat qui interdit aux salariés de prendre leurs vacances au mois d’août… Mais les médecins libéraux sont plus individualistes.  »

Sur Internet, les conseils pour trouver un remplaçant se multiplient  : bouche-à-oreille, liste de remplaçants potentiels auprès du conseil de l’ordre – à charge, pour le praticien, de prendre son téléphone pour les appeler un par un… Mais aussi sites de petites annonces, annuaires de remplaçants, et même agences qui cherchent la perle rare. Une fois qu’on en tient un, il s’agit de le fidéliser. «  C’est la loi de l’offre et de la demande, explique Etienne Guyon, médecin généraliste en Picardie. Avec 238 médecins seulement pour 100 000 habitants, c’est le département le plus sinistré en matière de démographie médicale  : lorsque j’ai commencé, on versait à notre remplaçant 66 % des honoraires, puis 70 %, et aujourd’hui 80 %.  » 85 % même pour Pierre Jeannin, qui laisse aussi à son remplaçant sa maison personnelle… «  En Seine-Saint-Denis, c’est 100 %, ­témoigne Gérard Aoustin. Et même avec une telle ­rémunération, on imagine bien que les candidats du mois d’août ne se bousculent pas.  »

Un modèle d’orientation des patients


Le département a donc tenté de s’organiser. «  Il fut une époque où les médecins étaient réquisitionnés sur injonction du préfet. On recevait une lettre au cabinet et il fallait obtempérer. Cela ne marchait pas. Certains médecins avaient toujours de bonnes raisons, familiales, de santé… pour ne pas participer aux gardes.  » Depuis quelques années, le conseil de l’ordre a mis en place un système de listes sur lesquelles les médecins s’inscrivent pendant les vacances. Ils y indiquent les périodes où ils sont présents. Transmise au 15, cette liste permet d’orienter les patients pour leur éviter d’avoir à appeler 20 cabinets avant qu’un médecin ne décroche. Sur les 1 200 médecins du département, la moitié s’inscrivent dans la liste  : «  On a mis en place une coordination qui ne marche pas trop mal. Il faut rester modeste. Par ­rapport à rien, c’est bien… Mais nous sommes loin de la perfection.  »

Présentée comme un modèle par Roselyne Bachelot lorsqu’elle était ministre de la ­Santé, l’organisation du 9-3, qui paraît pourtant aller de soi, a semble-t-il du mal à faire des petits dans d’autres départements français. La sacro-sainte liberté du médecin rend probablement impossible la seule mise en place de listes de congés. Mais en Seine-Saint-Denis, il est vrai que la question de la permanence des soins dépasse largement la période des vacances. «  Elle pose problème toute l’année  », déplore Gérard Aoustin. Cette pénurie de médecins a poussé le département à être pionnier dans la mise en place des maisons de garde. Il en existe 5 en Seine-Saint-Denis sur 238 en France. Elles jouent un rôle important dans la permanence des soins. «  Pour des raisons de sécurité, les généralistes du département ne souhaitent pas exercer le week-end dans leur cabinet. Nous mettons à leur disposition un local sécurisé, avec un vigile.  »

Tous les départements ne sont pas aussi bien dotés  : «  J’ai des patients de la région parisienne qui séjournent à Lacanau-Océan et qui, de retour chez eux, m’appellent la nuit ou le week-end… Ils savent qu’il y a toujours quelqu’un au cabinet. Pas la peine de vouloir parler à un médecin à Paris le week-end du 15 août  », explique le Dr Daniel Camiade. La station balnéaire de 4 000 âmes l’hiver voit sa population multipliée par 10 l’été… Huit médecins exercent dans un rayon de 40 kilomètres. «  Il va de soi que nous ne ­prenons pas nos vacances l’été. Nous travaillons jour, nuit et week-end, même l’hiver personne ne rechigne à faire des gardes.  » Une implication que les patients ne retrouvent pas forcément sur l’ensemble du territoire. «  Eviter de faire des gardes est ­devenu un sport national. A Lacanau et dans les villes environnantes, les médecins ont tous la soixantaine. Nous allons tous partir à la retraite en même temps… Nos ­successeurs seront-ils prêts à travailler quatre-vingts heures par semaine, le jour, la nuit et le week-end  ?  »

Remerciement à VIVA PRESSE particulièrement à Anne-Marie Thomazeau

P.S.

Le réflexe 15

En cas de problème la nuit, le week-end ou durant les vacances, les Français ont de plus en plus tendance à se rendre directement aux urgences des hôpitaux… Résultat, des services bondés, des attentes interminables et, dans 80 % des cas, des «  urgences  » qui n’en sont pas. Ils n’ont pas le réflexe 15. Car la plupart d’entre eux pensent que le numéro des Samu ne doit être appelé qu’en cas d’urgence vitale. Et si, en effet, le 15 est capable d’intervenir avec l’envoi d’une unité de soins intensifs ou d’une ambulance pour une personne qui ne peut pas se déplacer, il a aussi comme mission d’assurer la permanence des soins et une régulation médicale. Son rôle est d’orienter chaque malade vers la prestation médicale que son état requiert dans des situations qui ne peuvent attendre la réouverture du cabinet du médecin généraliste (nuit, week-end, vacances). Cette prestation peut être soit une aide téléphonique, soit de les diriger vers un médecin généraliste en service, une maison ­de garde ou, éventuellement, les urgences, si le cas en relève.

[1] La permanence des soins désigne le dispositif sanitaire ­qui permet aux citoyens de recourir à un autre praticien lorsque le­ ­cabinet de leur médecin traitant a ­fermé ­ses portes.


Interview : «  Le médecin n’est pas un livreur de pizzas  »


Pas facile de trouver un médecin pendant les vacances  ?


Pendant ces périodes, nous devons faire face à deux types de situations. Il y a d’abord les lieux de villégiature, comme les stations balnéaires. Dans ces endroits touristiques, il est évident que les médecins prennent leurs vacances hors saison. Ils peuvent en outre bénéficier d’un assistant qui vient en renfort durant la période de pointe et dans les secteurs où il y a des besoins. C’est une disposition prévue par le Code de santé publique. Le médecin bénéficie d’une autorisation du conseil de l’ordre départemental. Ensuite, il y a les régions non touristiques. Les médecins ont l’obligation déontologique de s’entendre avec leurs confrères pour étaler leur départ. Et en général, cela fonctionne bien.

Et quand il n’y a pas de confrère  ?

Il est clair qu’il y a de grosses difficultés pour trouver des remplaçants. Ce n’est pas une nouveauté. Mais cela s’aggrave et cela va continuer. Dans les cas extrêmes, le conseil de l’ordre départemental peut saisir l’agence régionale de santé pour l’alerter sur les difficultés locales… Mais on ne peut pas inventer de remplaçants là où il n’y en a pas.

Faut-il augmenter le numerus clausus  ?


Ce n’est pas parce que nous aurons plus de médecins que ces derniers seront désireux d’exercer dans les secteurs où il y a des besoins.

Certaines municipalités rurales parlent de salarier des médecins… Est-ce une solution  ?


Dans certaines régions, comme le Morvan, qui sont des déserts médicaux, pourquoi pas  ? Mais ces médecins, il faudra aussi les remplacer pendant leurs vacances.

Alors quoi faire  ?

On ne va pas jouer aux caporaux-chefs en disant aux médecins  : «  Vous ne partez plus en vacances.  » Les Français vont devoir s’habituer à ne plus avoir un médecin au pied de leur immeuble. Avant, il y avait un médecin par village. Demain, il y aura peut-être quatre médecins regroupés dans un village pour couvrir huit villages. Pour aller à la poste, au supermarché, dans un cabinet de radiologie, les gens se déplacent. Ils devront apprendre à faire pareil avec leur visite chez le médecin, c’est-à-dire à planifier. Le médecin, ce n’est pas un livreur de pizzas.-
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